Le Maitre d’école avec Coluche !

 

Au risque de s’attirer les foudres des cancres, des bonnets d’âne et des squatteurs du dernier rang, nous l’assumons haut et fort : on adore l’école !!! Ce n’est pas pour rien qu’on vous parle très souvent de tous ces objets qui nous ont accompagnés dans notre scolarité. Et comme on aime aussi le cinéma, et bien entendu qu’on aime Coluche, vous parler du film “Le Maître d’Ecole” nous est apparu utile … et agréable !

Car on aime l’école, certes, mais on aime encore plus les films qui se passent dans des écoles. Les programmateurs des chaînes TV en manque d’inspiration aussi d’ailleurs, car c’est très souvent qu’on a droit aux rediffusions de P.R.O.F.S., des Sous-Doués … et bien sûr du Maître d’Ecole.

Le Maître d’école est une comédie française de 1981, tournée avant le grand bouleversement de l’élection mitterrandienne. Détail qui a son importance quand on s’intéresse rétrospectivement au contexte du film. Il s’agit d’un des films où Coluche tient le premier rôle, loin des comédies traditionnelles que furent “Banzaï”, “Inspecteur la bavure” ou “La vengeance du serpent à plumes”. Je parlerais plutôt de comédie dramatique, car le film aborde un grand nombre de problèmes post-crise pétrolière qui frappent de plein fouet la France giscardienne : le chômage, le divorce et son corollaire les familles mono-parentales, le manque de moyens de l’Education Nationale, la dépression … bref, tout ce que les enfants du début des années 80 ont eu à subir malgré eux.

Mais revenons au film … et à Coluche. Bien qu’il ne s’agisse pas d’un rôle triste et poignant à la Tchao Pantin, Coluche permet au film de véhiculer pas mal de messages, sur lesquelles nous reviendrons plus tard.

Il interprète le rôle de Gérard Barbier, un ex-vendeur de fringues au chômage, qui se remet en question et cherche sa voix. Et lui vient comme une révélation : et s’il devenait instituteur ? Le film peut présenter la chose de manière facile, mais apparemment à l’époque l’Education Nationale permettait plus facilement d’être ce qu’on n’appelait pas encore “Professeur des écoles”.

Il devient donc assez rapidement instituteur suppléant, et arrive dans une école de la banlieue parisienne. Et là, il découvre très vite que le métier n’est pas une sinécure. En un rien de temps en effet, il va apprendre qu’être maître d’école, c’est aussi être psychologue, assistant social, conseiller, copain, père de substitution, et tant d’autres choses encore. Il se prend ainsi de plein fouet les maux de l’Education Nationale : la dépression de sa collègue Mme Lajoie (Josianne Balasko), la grosse grippe du Directeur (Jacques Debary), l’inflexibilité de l’instituteur syndicaliste (Roland Giraud) … Et comme si cela ne suffisait pas, il se retrouve à héberger un enfant fugueur dont les parents divorcent, à aider après ses heures de travail une fillette dont la mère divorcée est trop occupée pour s’occuper des devoirs, et même à conduire sa collègue dépressive aux urgences après une tentative de suicide !!

Mais dans cette succession de situations délicates, Gérard trouvera de réelles satisfactions, et particulièrement celle de faire réfléchir les élèves par eux-mêmes..

Le déclic lui viendra d’un tuyau du conseiller pédagogique au hasard d’une visite dans sa classe : faire penser les enfants autrement que par les livres, ou par la sacro-sainte parole de l’autorité. Dès lors, il ne se gênera pas pour instaurer des débats dans sa classe, loin des livres et des cahiers. Des séances de prises de parole où les enfants s’expriment sur des sujets jusqu’ici réservés aux adultes, et surtout tabous pour l’Education Nationale : la peine de mort, l’homosexualité, les élections, le chômage … Tout sera prétexte à de longues discussions à la fois drôles et sérieuses, ponctuées par des interventions naïves des enfants.

Ces dialogues, que l’on doit à Claude Berri, ont cependant dû être validés par l’acteur lui-même, tant les opinions de Gérard Barbier, l’instit, rejoignent celles de Coluche, l’humoriste et l’humaniste : position profondément républicaine, grande tolérance vis-à-vis des minorités, opposition à la peine de mort, rejet du syndicalisme bête et méchant … tout cela nous en fait un film bien plus politisé qu’en apparence, et réussit le challenge de délivrer beaucoup de messages sans se servir des enfants. Les gosses sont là pour rendre le film bon enfant, avec des scènes touchantes et innocentes, du chahut, des rires, de la fraîcheur.

L’ensemble nous donne un joli mélange où les passages drôles sont mixés à la légère satire que représente ce film. Coluche y est très bon, n’en fait pas des tonnes et sait rester naturel. On assiste à sa découverte du métier, et à ses premiers pas en tant que professeur, maladroits et hésitants, mais totalement humains. Le reste de la distribution est du même acabit : Josiane Balasko est parfaite en institutrice dépressive, Roland Giraud itou quand il se met dans la peau du syndicaliste, et Jacques Debary nous divertit bien dans le rôle du chef d’établissement totalement dépassé par les évènements.

On y voit aussi Charlotte de Turckheim, la fiancée de Coluche (elle doit prononcer 10 mots en tout et pour tout dans le film, mais elle y est très charmante). Quant aux enfants, aucun d’eux n’était acteur, il s’agissait des véritables élèves de l’école Alain Fournier de Plaisir dans les Yvelines.

Et cerise sur le gâteau, la bande originale est excellente, avec Alain Souchon, et surtout Richard Gotainer qu’on voit faire quelques pas de danse à la fin du film, lors du mariage de Coluche, dans son inoubliable Sampa !

Quelques pics sont également distribués à toutes ces attitudes intolérantes qui malheureusement étaient exprimées sans complexe il y a 35 ans, comme par exemple le fait de proposer de ne garder à l’école que les enfants de parents français. Le film est ainsi assez politiquement incorrect, et comme beaucoup  de comédies de l’époque, n’aurait aucune chance de sortir de nos jours sans s’attirer les foudres de la bien-pensance. On y voit des enfants jouer avec la nourriture (ahhh, les batailles de purée !!), les profs boire du vin à la cantine, et même un môme fumer au mariage de Gérard !!

Le succès fut au rendez-vous en 1981, puisque les salles de cinéma accueillirent plus de 3 millions de spectateurs, dans la moyenne des films avec Coluche en tête d’affiche. Et depuis, chacune des rediffusions du Maître d’École cartonne sur la TNT.

Je l’ai vu à plusieurs reprises, mais je me souviendrai de ma première fois : c’était sur Canal Plus en 1986 (un peu avant la mort de Coluche) … en codé. Oui oui. A l’époque, on pouvait suivre un film sur Canal, les images étaient cryptées mais (presque) regardables, et en tendant l’oreille, on pouvait choper une bribe de phrase au milieu des “CCCHHHcrrrr CChhhrreeee Chhhrrrrr” 😉 Bon, bien entendu, je n’ai absolument rien compris au film, mais au moins, “Le Maître d’école” est le premier film que j’ai vu sur Canal Plus 😉

Depuis, je l’ai revu plusieurs fois, et bien entendu, si j’ai le malheur de tomber dessus lors d’une rediffusion, il m’est impossible de zapper avant la fin du film ! Les mauvaises langues diront qu’il ne s’y passe pas grand chose, que l’intrigue est plate. C’est pas faux, mais l’essentiel est ailleurs.

L’originalité du film réside dans la succession de scènes tantôt drôles, tantôt sérieuses, mais surtout dans ce décalage entre la vision de l’école côté enfants (le chahut, l’innocence), et côté adultes (le manque de moyens, le surmenage). Y voir Coluche se débrouiller comme il peut pour assurer sa mission, et galérer pour gérer 3 classes à la fois vaut largement le visionnage du film.

Sans parler des souvenirs que chacun d’entre nous a connu dans son école primaire : les interminables sorties de classe en forêt, les parties de foot dans la cour, les chansons dans le bus scolaire, le bordel à la cantine, les séances de piscine, les punitions, et tellement d’autres choses qui nous font replonger à cette belle époque … Un bien bon film donc, que je vous encourage à regarder si vous aimez les comédies françaises des années 80 !

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